Seulement 15 jours par an avec mon père
Retour dans mon passé. Je replante le décor : mon père me présente (ainsi qu'a ma grand mère Nicou) sa nouvelle compagne "la femme de ménage" (qui est secrétaire dans une boite de son village) et sa fille "Mongola" (petit clin d'oeil à Elie Kakou).
Tout ce que je peux dire, c'est que Nicou n'a pas trop "accroché" sur sa nouvelle belle fille. C'est peut être pour ça qu'elle a gardé un aussi bon contact avec ma mère les premières années du divorce de mes parents. Elle qui adorait passer du temps à se balader avec son fils, elle était à présent obligée de se coltiner sa belle famille en permanence. Plus aucun moment d’intimité avec son fils adoré ...
Nous avons donc par la suite fait la connaissance de la grande famille de Marie Claire. C'est très simple, chaque vendredi et samedi soir (voir même dimanche et tous les soirs d'été), toute la famille se réunie chez les grands parents pour prendre l'apéro et on se retrouve très vite à 15 autour d'une table à vider des bouteilles d'alcool. Car ici, même les enfants de 12 ans boivent le cidre, le vin et le pastis.
C'est l'une des raisons pour laquelle j'étais considérée comme la "coincée du sud", car je le rappelle, nous sommes dans le département de la Somme à ce moment là et ma mère est partie vivre avec Guano sur la cote méditerranéenne (m'emmenant par la même occasion) et mon éducation ne m‘a pas appris à boire du pastis à mon age.
Mon père s'est remit à fumer par la même occasion (la cigarette mais également le cigarillos tout juste initié par Marie-Claire ) et a grossi d'environ 20kg en l'espace d'un an et demie (pas à cause de la bouffe, - d'après ma grand mère sa compagne ne sait pas cuisiner ce qui est un sacrilège dans ma famille- mais à cause de l'alcool, au point que Nicou croyait son fils préféré alcoolique).
Avec le temps, je ne passais plus aucun moment seul avec mon père, ce qui me manquait énormément, surtout que je ne le voyais que 15 jours par an. J’étais habituée à aller au parc et au Quick en sa compagnie, à jouer avec lui, à faire des pique-nique.
À présent, tout se faisait avec Marie-Claire et sa fille Marion. Résultat : nous passions notre temps chez les grands parents ...
Les premiers temps étaient amusant, je m’amusais à donner à manger aux poules et aux lapins, je regardais le potager ... Puis je finissais dans un coin du jardin à 100 mètres de « l’apéro ».
J’étais la « coincée du sud » et les cousins et cousines de Marion se moquaient sans arrêt de moi en disant qu’a 10 ans j’étais incapable de boire un verre d’alcool.
Quand la famille partait en pleine nature chercher des escargots pour les manger plus tard, j’étais la seule qui n’osait pas en prendre de peur de me retrouver face à une araignée ou un insecte répugnant.
Le jour où je fus le plus blessée, c’est celui de l’anniversaire de Marion. En réalité, nous devions fêter le sien et le mien le même jour. Sauf que personne ne savait que j’étais sur le point d’avoir mes 12 ans ... Tout au long de la journée, tout le monde couvra Marion de bisou en lui souhaitant une bonne fête et en lui offrant des cadeaux, moi je ne faisais que la regarder ...
Je pense que j’ai réellement commencé à la détester ce jour là.
Ce n’est qu’a la fin de la journée que j’expliqua rapidement à la tante de Marion que nous fêtions également mon anniversaire aujourd’hui. Elle alla en parler à tout le monde en disant que c’était dommage que personne ne le sache : je n’avais pas eu de cadeau ni de carte d’anniversaire et je n’avais pas soufflé les bougies.
C’est idiot, mais j’en ai beaucoup voulu à mon père ce jour là et le soir, j’ai beaucoup pleuré toute seule dans mon lit. Et pourtant, je ne lui en ai jamais parlé.